Juillet 2023 – L’ALSACE NON SANS MAL

Certes, nous sommes dans un bel environnement, avec vue depuis la terrasse de notre location sur ces immenses bouleaux où se balancent de ravissants petits oiseaux qui gazouillent tant et plus. Un dindon glougloute, un chien aboie paresseusement au loin… On en oublie un peu le mobilier et la déco, qui date des années soixante. Mais nous avons tout ce qu’il faut pour cuisiner. Heureusement d’ailleurs, car nous n’irons pas une seule fois au restaurant le soir. Il n’y en a tout simplement pas !

Notre village de 700 âmes, ASCHBACH, n’a rien d’autre qu’une seule boulangerie à proposer. On n’y trouve même pas de pain complet ou de pain de campagne, seulement de la baguette et du pain blanc. Nous avons vraiment atterri au milieu de nulle part, c’est-à-dire qu’il y a 17 km d’ASCHBACH à WISSEMBOURG et même 26 km jusqu’à HAGUENAU. En soi, ce n’est pas grave – s’il n’y avait pas les travaux de voirie.

Mais revenons à la première soirée idyllique. Le regard va des bouleaux à la rue principale du village, où les tracteurs circulent jusqu’à neuf heures et demie du soir, car la paille doit être mise à l’abri avant la pluie, annoncée pour la semaine prochaine.

Ce soir, il fait encore très chaud et nous pouvons comprendre les volets baissés aux trois quarts dans les maisons en face – mais cela ne changera jamais de toute la semaine, même s’il ne fait plus que 18 degrés dehors. Apparemment, on ne veut en aucun cas que quelqu’un s’amuse à enjamber le muret du jardinet pour aller jeter un coup d’œil dans le salon…. Les maisons sont toutes grandes et bien entretenues – mais où est la vie ?

Je m’endors tôt, la journée a été longue. Réveillée en sursaut à 5h30 tapantes par ce qui me semble être un énorme tintamarre de cloche ! Irritée, je regarde par la fenêtre, mais je ne vois ni ne sens de fumée nulle part, donc pas de feu. J’essaie de me rendormir et ferme aussi mes deux fenêtres pour ne pas entendre l’horloge de la tour qui sonne en plus tous les quarts d’heure. Plus tard en matinée, notre propriétaire soigne les tomates dans son jardin et je lui demande ce qu’il en est de cette sonnerie intempestive à l’aube. Il sourit finement et me dit : « Autrefois, une maison sur deux ici était une ferme avec du bétail qui voulait être nourri et trait le matin. Nous n’avions pas de portable pour nous réveiller, mais les cloches. Et la tradition est restée ainsi. » Evidemment, nous ne sommes jamais qu’en 2O23 et il n’y a plus que quelques fermes… Soupir !

Nous allons à SOULTZ au grand supermarché, faire des courses pour la semaine. Premier village : pas une seule épicerie, mais par contre un grand distributeur « Pizza 7 jours/24h » ! Pas un bistrot et pas une personne dans la rue. Bon, ils travaillent peut-être tous – mais où sont les enfants et les vieux ? Allô, il y a quelqu’un ??? Nous ne voyons quasiment personne, pas même dans le deuxième village ni dans le troisième. Celui-ci s’appelle justement HOFFEN ( » espérer  » en allemand), et là, le passage est soudain barré et aucun panneau  » déviation  » n’est visible. Nous avons de la chance dans notre malheur et pouvons suivre une voiture avec une plaque d’immatriculation locale qui fait demi-tour devant nous. En passant par de petites ruelles, nous arrivons tant bien que mal à retrouver la bonne route. Lorsque nous racontons notre mésaventure à Monsieur Fischer dans l’après-midi et lui demandons comment cela est possible, il se contente de hausser les épaules :  » Eh bien, ici, tout le monde sait où il faut aller pour éviter les travaux « . Logique ! Pourquoi se donner la peine d’installer quelques panneaux pour les quelques pauvres touristes qui s’égarent ici ?

En résumé : du lundi au vendredi, nous avons connu CHAQUE jour un nouveau chantier dans un autre village et presque jamais un panneau de déviation. Notre GPS et moi (avec la carte Michelin) avons rivalisé à qui trouverait le plus rapidement la meilleure solution par les petites et très petites routes de campagne – mais Mi et moi avons râlé à l’unisson ! De plus, même les panneaux de localisation sont souvent si fanés qu’ils en sont presque illisibles. Je pensais naïvement que c’est interdit. Cela ne nous était encore jamais arrivé nulle part ailleurs en France.

Pour en rester à « une route barrée chaque jour » : le dernier jour, samedi, en pleine rando autour de la « Tête de Lynx » – proche du Col des Pigeonniers – notre chemin est barré par….un arbre tombée dans l’intempérie ! Heureusement, nous arrivons à l’enjamber.

Après les courses, nous voulons faire notre première petite randonnée dans la FORÊT D’HAGENAU. Cette « forêt sacrée » est le plus grand massif forestier plat (!) de France, d’une vingtaine d’hectares. Au milieu se trouvent les restes du « gros chêne » et des panneaux y mènent de tous les côtés. Mais il ne faut pas exagérer non plus : une fois sur l’une des petites routes forestières, il n’y a plus de panneaux. Même juste avant d’arriver, nous devons encore demander aux randonneurs où se trouve le parking ! Celui-ci est très bien aménagé et apparemment un lieu apprécié des visiteurs. Une aire de jeux, une auberge (ouverte uniquement le week-end), une chapelle et des arbres. Parmi ces arbres, un vestige du début du siècle dernier, le gros chêne de Saint Arbogast, un spécimen impressionnant dont il ne reste qu’un morceau d’origine au milieu de l’arbre. 5,33 m de circonférence, à 1,50 m du sol, ce chêne a subi un incendie et un coup de foudre mortel en 1913, le tout à quelques années d’intervalle.

Nous enfilons nos chaussures de marche, prenons nos bâtons et c’est parti ! Nous commençons par admirer le chemin, qui est même accessible aux fauteuils roulants. Mais au bout de 20 minutes seulement, nous sommes – DEVIEES, car des travaux sont en cours sur le seul et unique pont qui enjambe la petite rivière SAUER ! Est-ce que tout cela est possible le même jour ? Oui ! Nous continuons en grinçant des dents et subissons en plus une attaque en règle des moustiques et des mouches, car il commence à faire lourd. Donc, rien à faire – ça ne veut pas aujourd’hui. Et la ville de Haguenau ne nous inspire pas non plus.

Il en va tout autrement le lendemain avec WISSEMBOURG, où l’on trouve enfin une ville animée avec des bistrots, des restaurants de rue pleins de gens et même un glacier où nous sommes bien servies.

Revigorées, nous passons devant l’hôtel de ville pour nous rendre à la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul, construite au 7e siècle, dans laquelle nous laissons l’atmosphère de recueillement bienfaisante nous envahir.

Nous nous offrons ensuite une heure de voyage dans « le petit train », qui est sur le point de partir et qui est déjà presque plein. Ces petits trains, comme le bus  » Hop-on  » dans les grandes villes, sont toujours le meilleur moyen d’avoir une vue d’ensemble confortable.

Cette ville de 7000 habitants a un cachet typiquement alsacien : maisons à colombages, beaucoup de fleurs, des peintures murales, de belles enseignes et portes anciennes – c’est tout simplement charmant.

Tout à coup, le train nous emmène sur une route assez pentue vers des vignobles – le pinot gris de cette région est réputé – et après un bon quart d’heure, nous atterrissons devant le fameux panneau bleu aux étoiles de l’Europe :  » Bundesrepublik Deutschland « .

C’est une surprise réussie, d’autant plus que le village de SCHWEIGEN est vraiment particulièrement bien situé et connu pour sa WEINTOR, la porte du vin. C’est en effet ici que commence (ou finit) la Weinstraβe, la route des vins. Le village et ses vignobles étaient déjà mentionnés au 9e siècle par Charlemagne en tant que sites remarquables.

On s’arrête pour pouvoir descendre et prendre le prochain petit train qui nous ramènera à Wissembourg dans une demi-heure. Bonne idée ! SCHWEIGEN ne compte qu’environ 500 habitants de plus que notre ASCHBACH – mais quelle différence ! Ici, il y a 18 (!!) endroits où l’on peut se restaurer, de la cave à vin au « restaurant raffiné avec terrasse ensoleillée » en passant par les salons de thés. Tout y est coquet et élégant – le tourisme s’en trouve forcément revigoré. La vue sur le village et ses environs sur le chemin du retour nous plaît tellement que nous décidons spontanément d’essayer le Palatinat pour nos prochaines randonnées.

Le lendemain, nous partons pour CLEEBOURG, plus précisément pour son seul restaurant. Il ne se trouve même pas dans le village (encore une fois, il n’y a pas une seule épicerie – on préfère maintenant faire des kilomètres pour faire les courses dans le super-hyper-marché. C’est triste.) Situé près de la coopérative « La cave vinicole », il propose une carte coûteuse. Cela va avec les voitures chères sur le parking. Mais nous, on s’en fiche, car nous portons notre pique-nique dans le sac à dos.

Nous voulons nous rendre au COL DU PIGEONNIER, 300 m plus haut, sur le sentier balisé par le Club Vosgien, juste en face du restaurant. C’est fatigant (c’est surtout la descente qui me donne du fil à retordre) mais c’est beau et ça en vaut la peine. La bonne nouvelle, c’est qu’il n’y a aucune trace de « FORET EN DANGER » ! Les arbres y sont tous immenses et sains. Les hêtres et les chênes alternent avec les pins et les épicéas, c’est un plaisir de voir que la forêt est bien entretenue et de marcher sur des chemins très bien balisés. Arrivées en haut, je suis fière de moi : 1h10 pour 300 m de dénivelé.

Nous faisons une rencontre sympathique avec un couple et ses trois enfants, venus en voiture. Elle a apporté une nappe qu’elle pose sur la moitié de la grande table en bois où nous mangeons déjà. Ils nous proposent spontanément de partager leurs provisions. Ce sont les premières personnes avec qui nous pouvons vraiment parler depuis que nous sommes ici, car nos propriétaires sont plutôt… fermés.

Les jours suivants, nous faisons encore deux autres randonnées dans la même région (car la forêt de Haguenau est tout simplement trop plate pour nous) – belles, mais malheureusement pas aussi variées que celles des environs de METZERAL l’année dernière.

Le seul jour maussade de la semaine, nous allons à la BRETZELFABRIK de Monsieur Boehli à GUNDERSHOFFEN. Nous y apprenons ce qui est nécessaire à la préparation de ses bretzels, à savoir le blé, l’huile de tournesol (d’où les immenses champs partout dans cette région) et le sel.

En suivant un « tunnel en verre », intelligemment conçu à travers l’usine, nous pouvons voir comment les petites bretzels, d’abord encore tout pâlottes sur les plaques, sont percées de minuscules trous, doivent ensuite passer par une  » pluie de sel  » et deviennent enfin, avec la saumure de malt, les appétissants biscuits que nous pouvons déguster. Et après cela, nous sommes aussi enjouées que celui-ci :

Un gag pour finir : quand Mi me ramène à Paris le dernier jour, nous arrivons à peu près à la hauteur de ma rue – et nous sommes bloquées pour cause de travaux et sans panneau de déviation. Mais ici, c’est MOI qui sais où passer, ha !

https://reisenmit.marenberg.com/marenberg-admin/
Posts created 60

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Articles similaires

Commencez à saisir votre recherche ci-dessus et pressez Entrée pour rechercher. ESC pour annuler.

Retour en haut